C'est la fin des éditeurs. Devenus de simples marchands, ils n'ont plus notre confiance et la technologie nous en dispense. Ce tableau de Tiepolo fils invite à leur tourner le dos. Grouillot de son célèbre père pendant des années pour brosser des tableaux académiques sans âme, Giandomenico Tiepolo a pris sa mesure après la mort du père, osant des fresques "impubliables" à son époque. A l'imposteur succèda un vrai artiste.

lundi 23 décembre 2013

Une maison où écrire

Une "Maison de l'Écriture" va ouvrir prochainement à Montricher, dans le Jura suisse. Ce sera à la fois un lieu de résidence pour les auteurs et un lieu d'animations sur la littérature (conférences, expositions, spectacles). Très belle initiative. Trop belle. Décor fastueux. Architecture d'avant-garde. L'édifice a coûté une fortune (suisse) et sera vraisemblablement réservé à des invités de marque. À des auteurs de marque (reconnue). Tenue correcte exigée. On y parlera bas et pointu, pour des propos de grande intelligence rapportés par la presse.

Le projet de "maison d'écriture" de l'association L'Ermitage est tout autre. On descend dans les faubourgs, la littérature a perdu sa majuscule. La porte sera ouverte à tous ceux qui écrivent, car écrire, c'est penser la vie, ce qui en fait une activité spirituelle, étrangère au souci de la gamelle des animaux domestiques et de la "pathologie du profit" dénoncée par Noam Chomsky. Arrachons le mot spiritualité des mains sales de la religion, affirmons-le haut et clair, on n'est pas des bêtes!
Cette référence à la dignité est au fondement même de la maison de l'écriture qui se construira au bord du fleuve Orb, dans l'Hérault. C'est beau, d'écrire. Beau et bon, même sans ambition littéraire.
D'ailleurs, la vraie littérature s'accommode mal d'une "ambition". Comme le dit Jean Dubuffet: "L’art ne vient pas coucher dans les lits qu’on a faits pour lui ; il se sauve aussitôt qu’on prononce son nom : ce qu’il aime c’est l’incognito. Ses meilleurs moments sont quand il oublie comment il s’appelle."
Une fleur sauvage, surgie on ne sait comment sur le bas côté de la route, peut avoir plus de valeur qu'un bouquet composé par un artiste du genre. Et relisons les "Lettres à un jeune poète".